Le kératocône est une pathologie cornéenne évolutive dont les formes débutantes peuvent échapper aux examens classiques et à l’analyse de leurs résultats par le praticien. Or, cette affection constitue pourtant une contre-indication stricte à toute chirurgie réfractive au laser, en raison du risque d’ectasie post-opératoire. L’intelligence artificielle (IA), permet aujourd’hui une détection plus sensible et standardisée des stades précoces de cette pathologie.
Kératocône et limites du dépistage classique
Le kératocône est une pathologie évolutive caractérisée par un amincissement progressif et une déformation conique de la cornée. Cette affection induit une dégradation de la vision, liée à l’apparition d’un astigmatisme irrégulier et, dans ses stades avancés, à la formation d’opacités de nature cicatricielle.
Cette déformation progressive se déclenche généralement à l’adolescence ou au début de l’âge adulte et évolue ensuite de manière variable, non prévisible. Son dépistage repose sur une analyse de la topographie de la cornée pour en analyser la courbure, et de la tomographie Scheimpflug, qui fournit une imagerie en coupe.
Si ces examens permettent d’identifier les déformations typiques, ils présentent néanmoins une limite majeure : leurs résultats doivent être interprétés par le praticien, et cette intervention humaine fait qu’il existe une variabilité inter-opérateur. Les stades infracliniques peuvent ainsi passer inaperçus, alors même qu’ils représentent déjà une contre-indication stricte à la chirurgie réfractive cornéenne, en particulier au LASIK, en raison du risque d’ectasie post-opératoire.
Cet écueil diagnostique justifie l’intégration d’outils basés sur l’IA plus sensibles et plus reproductibles, pour mieux détecter les kératocônes précoces.
Apport de l’intelligence artificielle dans le dépistage précoce du kératocône
L’intelligence artificielle (IA), et en particulier les méthodes d’apprentissage automatique, apportent une solution aux limites évoquées plus haut.
Notamment, le « machine learning » s’appuie sur des bases de données incluant des milliers d’examens cornéens, associant topographie, tomographie et paramètres biomécaniques. Ainsi, en confrontant ces données à des diagnostics confirmés, les algorithmes apprennent à identifier des combinaisons de variables trop subtiles pour être détectées par l’observateur humain.
Plusieurs études récentes confirment tout l’intérêt de cette approche, en particulier celui des réseaux de neurones « convolutionnels ». Ils permettent de bâtir des algorithmes d’IA spécialisés dans l’analyse d’images et appliqués à l’étude des cartes cornéennes. Les résultats obtenus mettent en avant une précision proche de 98 % pour différencier les cornées normales et celles atteintes de kératocône.
Cela va permettre dans le futur de standardiser l’analyse des résultats du bilan préopératoire, en réduisant la variabilité des conclusions inter-praticiens. Les conséquences cliniques sont importantes pour la sécurité des patients. Par ailleurs, au-delà de la simple détection, la prise en charge thérapeutique sera aussi mieux guidée, en distinguant les formes frustes de kératocône des formes évolutives.